Des milliers de personnes ont pris la route vers Gaza pour entrer dans l'enclave, permettre aux convois humanitaires de passer et réclamer un cessez-le-feu. AP - Yousef Murad
Ce jeudi 12 juin encore, de nombreux volontaires sont attendus dans la capitale égyptienne, avec l'objectif de marcher vers Gaza à partir de vendredi. Ils ont prévu de prendre des bus pour la ville d'Al Arish, à 50 kilomètres de Rafah, le poste-frontière avec Gaza. Le reste du trajet se fera à pied, matin et soir pour éviter la chaleur, pendant trois jours. Une manifestation est prévue à l'arrivée.
« Les ONG ne fonctionnent plus, les politiques ne font rien... Donc, qu'est-ce qu'on fait ? Est-ce qu'on regarde Gaza mourir ou est-ce qu'on se lève et on marche vers Gaza ? », s'interroge Hisham al-Ghaoui. Ce docteur, qui représente la branche suisse de cette initiative à l'origine de la marche vers Gaza, privilégie la seconde option. Lui s'est déjà rendu à trois reprises dans l'enclave côtière ravagée par les attaques israéliennes depuis octobre 2023.
Ces missions humanitaires à Gaza l'ont profondément marqué. Elles lui ont aussi laissé un sentiment d'impuissance et de frustration. Mais elles lui ont surtout donné l'envie de créer une pression morale et médiatique internationale. « Cette initiative est certes pour Gaza, pour un cessez-le-feu. Mais derrière, il y a une autre intention : celle de sauver les droits de l'homme. On y va pour sauver notre humanité. Moi, j'y vais aussi pour mes propres enfants, en Suisse. Parce que je ne veux pas qu'ils grandissent dans un monde où on voit ce genre de choses et on accepte », explique-t-il au micro d'Alice Froussard, du service International de RFI.
Alors, ces marcheurs pacifistes, indépendants, apolitiques, non religieux, épris de justice, qui ont tous payés leur billet d'avion et leur nourriture, ont rendez-vous en Égypte. Leur objectif est d'arriver à Rafah après trois jours de marche dans le désert, puis de camper et manifester, afin que les camions d'aide humanitaire puissent entrer dans Gaza. Tous ont une expression à la bouche : « La responsabilité de chacun » pour, insistent-ils, « en finir avec ce conflit colonial » qui les empêche tous de dormir.
Si le départ de la marche est programmé pour vendredi, certains militants sont arrivés au Caire dès mardi où ils sont désormais surveillés de près par les autorités. Plusieurs Français ont ainsi été interpellés dans leur hôtel ou à leur arrivée à l'aéroport du Caire, a déclaré à l'AFP Catherine Le Scolan-Quéré, porte-parole de la délégation française. Une dizaine de militants se trouvent actuellement retenus dans un local à l'aéroport du Caire, selon Coralie Laghouati, une infirmière de 39 ans, arrivée mercredi midi au Caire avec deux amies pour participer à la marche. « Mes amies ont été interceptées sans explication », a-t-elle dit à l'AFP.
« Toutes les personnes qui ont été interrogées ou sur lesquelles il y a eu des enquêtes sont libres. On n'est pas là pour cibler le gouvernement égyptien. On est très conscients que c'est un génocide occidental. Le but est de faire pression sur nos pays respectifs », confie Samuel Crettenand, militant suisse et coordinateur de l'initiative, au micro de notre correspondant au Caire, Martin Dumas Primbault.
L'Égypte n'a pas encore indiqué si les militants qui entendent rallier l'enclave de Gaza seront autorisés à passer la frontière. AP - Yousef Murad
Pour l'heure, les autorités égyptiennes n'ont pas donné leur feu vert officiel, alors que toute manifestation est interdite dans le pays depuis plus de dix ans. Samuel Crettenand prône une coopération étroite pour éviter tout débordement avant le départ vers le désert du Sinaï : « On appelle les autorités égyptiennes à nous tendre la main pour pouvoir mettre en place cette sécurité. On n'a pas de feu vert, mais on n'a pas de feu rouge. Le mouvement est en place, les gens viennent de tous les pays du monde et tant qu'on n'a pas un blocage strict des autorités égyptiennes, on continue notre planning de partir en bus et de rentrer dans le Sinaï. »
Dans un communiqué publié ce mercredi soir, le ministère des Affaires étrangères égyptien a affirmé conditionner tout accès à la frontière avec Gaza à l'octroi d'une autorisation préalable, sans donner plus de détails. Une première petite victoire pour Israël donc, qui a pressé plus tôt son voisin de bloquer les « provocations » pro-palestiniennes et de soumettre à des « autorisations préalables » toute action de militants étrangers sur son territoire.
« J'attends des autorités égyptiennes qu'elles empêchent l'arrivée de manifestants jihadistes à la frontière israélo-égyptienne et qu'elles ne les autorisent pas à se livrer à des provocations ou à tenter d'entrer dans la bande de Gaza », a indiqué le ministre israélien de la Défense, Israël Katz dans un communiqué.
Parallèlement à cette marche mondiale, un autre convoi terrestre, parti de Tunisie, fait route vers le territoire palestinien. La caravane Soumoud (« Résistance » en arabe), formée d'une dizaine d'autocars et d'une centaine de voitures, a passé sans encombres la frontière entre Tunisie et Libye mardi, et a été accueillie par une foule enthousiaste dans la capitale libyenne.
Si Le Caire réserve pour l'heure l'octroi de toute autorisation à quelconque convoi vers Gaza, un communiqué du ministère des Affaires étrangères égyptien souligne aussi qu'il « importe de faire pression sur Israël pour lever le siège de la bande de Gaza et permettre l'accès humanitaire ».
Pour info,
Un adhérente de Couleurs Palestine et du Collectif 69 de soutien au Peuple Palestinien (ainsi que 3 autres Lyonnais membres du Collectif) ont également pris l'avion pour Le Caire afin de participer à cette marche. Hommage à ces courageux.euses militant.es!!!
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